Rencontre avec Marc Lavaud : spécialiste de la photographie aérienne et fondateur de l’école "Graine de Photographe"

Rencontre avec Marc Lavaud : spécialiste de la photographie aérienne et fondateur de l’école "Graine de Photographe"

Rencontre avec Marc Lavaud : spécialiste de la photographie aérienne et fondateur de l’école "Graine de Photographe"

Retrouvez l'actualité de l'école Graine de Photographie, ici.

Bonjour Marc Lavaud, vous avez créé l'école Graine de Photographe, parlez-nous des formations que vous proposez, l'école délivre des diplômes?

M.L : L'école est avant tout destinée au grand public, en temps normal nous formons en moyenne 6000 personnes par an dans toute la France.Nous proposons des formations à la carte d'une demi-journée, des workshops d'une journée ou d'un week-end,  également des formations que nous appelons  grainedephoto academy sur 6 mois et aussi des voyages photo. Nous emmenons nos élèves sur le terrain comme au Brésil dans les Lençois ou encore le lac Baikal en Sibérie. Nous ne délivrons pas de diplôme mais des attestations de suivi de formation à la demande. Nous avons parfois des élèves qui se destinent au métier de photographe et qui se dirigent ensuite vers des écoles qui les préparent a passer des diplômes d'état. En 25 années de carrière je n'ai jamais rencontré de photographe a qui l'on avait demandé son diplôme pour travailler.  Mais apparemment un Cap , un Bac pro ou  encore un Bts peuvent toujours servir vis à vis des banques si l'on souhaite s'installer comme artisan ou bien travailler comme photographe dans une administration.

Vous proposez des cours aux enfants, ados, des cours de vidéo, des photos smartphone... Quand on a connu l'époque de l'argentique, des développements papier, on se dit que le métier de photographe a beaucoup évolué, un bon photographe c'est quoi ? 

M.L : Oui l'arrivée du numérique a démocratisé le métier de photographe et en même temps changé la profession.
 Aujourd'hui tout le monde est devenu photographe. Avant l'achat des films et les développements en labo avaient un coût non négligeable, il fallait maitriser la technique , l'erreur n'était pas permise .

Aujourd'hui le numérique permet de visionner immédiatement son image et de recommencer à l'infini jusqu'à obtenir ce que l'on souhaite. La manière de photographier a changé, je crois que l'on est moins rigoureux et que l'on mitraille beaucoup plus aujourd'hui. Je regrette le temps où l'on était obligé d'attendre le développement de ses films, cela faisait partie du processus et donnait une certaine valeur à notre travail.

Pour moi un bon photographe est quelqu'un de sensible, de curieux , d'observateur capable de faire passer un message, une emotion à travers ses images.

Et vous, quand et comment avez-vous commencé la photographie?

M.L : J'ai commencé la photographie enfant vers 10 -12 ans en colonie de vacances. Je n'ai jamais été très doué pour le dessin aussi pour moi l'appareil photo est tout de suite devenu un moyen d'expression.

Yann Arthus-Bertrand vous a donné le goût de la photographie aérienne, parlez-nous de cette rencontre...

M.L : Lorsque j'ai rencontré YAB , je travaillais comme assistant dans un studio photo de mode . Une de nos clientes était de sa famille et un jour elle m'a dit que Yab faisait construire un studio photo chez lui dans sa maison et qu'il cherchait un assistant qui connaissait les lumières. 

Yab était surtout connu à cette époque comme un photographe de reportage animalier et sportif. Je l'ai rencontré il m'a dit nous serons en voyage 8 mois par an, je vais passer plus de temps avec toi qu'avec ma femme aussi nous avons intérêt à bien nous entendre. J'ai commencé à l'assister et je suis finalement resté 5 ans.

Vue du Ciel” un honneur que de travailler avec Yann Arthus-Bertrand sur ce chef-d'œuvre, parlez-nous de l’histoire de ce livre ?


M.L : Au départ personne ne croyait à la réussite de ce livre , seul Yab savait que cela avait un intérêt car il photographiait en aérien déjà depuis pas mal d'années . D'abord pour des livres sur les régions en France puis également à l'étranger comme le Maroc vu du ciel  commande pour le roi du Maroc ou en core l'Argentine vu d'en haut.

Quand nous avons commencé à travailler sur ce projet en 1995 , il n'y avait pas encore de sponsor, ni d'éditeur. Yab finançait seul les vols en hélicoptère.

Puis une commande aérienne pour le club med a permis de mettre un coup d'accélérateur à son projet.
Nous devions photographier en aérien pour le catalogue du club les plus beaux villages dans le monde pour en faire la vitrine du club.

Cela a permis de financer les voyages, une fois les photos faites pour le club med, nous pouvions aller voler sur les sites qui nous intéressaient comme par exemple  les sites Maya de la péninsule du Yucatan.

Puis le projet a pris son envol avec l'arrivée des sponsors comme Canon, Fuji , l'éditeur  Hervé de la Martinière ami de Yab a fini par croire au projet, cela a fini par aboutir par la première exposition photo gratuite sur les grilles du jardin du Luxembourg et au succès du livre la terre vu du ciel ( record de vente au Guinness book dans le monde d'un livre de photos).

Avant de devenir photographe indépendant, vous avez travaillé pour le monde de la mode, de la publicité...dans quels univers vous sentez-vous le plus à l’aise ?

M.L : 
Avant de devenir photographe, j'ai d'abord été à ma sortie de l'école assistant photo pendant pratiquement 10 ans . C'est pourquoi j'ai au fil de mes rencontres, travaillé dans plusieurs domaines comme la mode la pub,le reportage. J'ai aimé toutes ces expériences, mais si je devais choisir celle que je préfère, ce serait le reportage car c'est celle qui pour moi est la moins superficielle, la plus vraie.

Est-il possible de devenir photographe professionnel ? Cela semble si difficile, subjectif ... Quelles sont les étapes à passer selon vous ? 

M.L : Oui c'est encore possible de devenir photographe, même si cela est de plus en plus compliqué pour en vivre , le modèle économique de mes débuts a beaucoup changé avec l'arrivée d'internet. Les droits des photographes ne sont pas toujours respectés aujourd'hui.

Il faut s'accrocher, les fins de mois peuvent être compliquées, il n'y a aucune sécurité d'emploi, pas de chômage pas de statut d'intermittent. C'est en quelque sorte sans filet et seuls les vrais passionnés réussissent à durer et à en faire leur métier.  Il n'y a pas de règle pour moi c'est la succession de rencontres qui m'ont permis de devenir photographe, de me constituer un réseau qui m'a permis de gagner ma vie.

Vous avez fondé en parallèle de votre activité de photographe indépendant, l’école Graine de Photographe, comment vous est venu l’idée d’enseigner et de transmettre votre savoir ?


M.L : L'idée de fonder grainedephotographe est d'abord parti du constat qu'aujourd'hui tout le monde fait de la photo avec son telephone portable ou avec un appareil sans forcément avoir de notions techniques. Quand on veux progresser à un moment donné, il faut obligatoirement avoir unminimum de connaissances techniques, pour justement pouvoir s'en affranchir et faire preuve de créativité. Je donne souvent cet exemple , si vous voulez apprendre à lire il vous faudra d'abord apprendre l'alphabet et bien si vous voulez progresser en photographie il faut au minimum savoir ce qu'est la vitesse et la profondeur de champ.

L'idée d'enseigner et de transmettre est donc partie de ce constat et aussi du fait que cela permettait aux photographes de créer leur propre activité générant des revenus complémentaires à un moment où le marché de l'image devenait de plus en plus difficile. ( crise de la presse-papier, fermeture des grandes agences photos Sipa, Sigma, Gamma).

Vous avez suivi une formation dans une prestigieuse école, l’EFET, une formation est-elle nécessaire pour devenir photographe ? Avec nos téléphones, les filtres... On s'y perd totalement non?


M.L : Pour moi cela a été la solution,  après mon bac je n'avais aucune envie d'aller en fac. Sans connaissance dans le milieu de la photo, une école de photo était tout naturellement le chemin à suivre. Par la suite j'ai compris que le métier ce n'était pas à l'école que je l'apprendrai mais en assistant des photographes. Mes premiers postes d'assistant je les ai trouvé dans les petites annonces des labos photo, ça parait fou aujourd'hui mais il n'y avait pas de tel portable ni d'internet. Il n' y a pas de règle pour ce métier, certains ont fait des écoles d'autres non.  Certains ont été assistants d'autres non chacun a son propre parcours. C'est avant tout un métier de passion.

Photographies et vidéos sont-elles indissociables?

M.L :  La photo et la video sont complémentaires, maintenant les appareils photo et les téléphones permettent de filmer dans une qualité largement suffisante par rapport à l'exploitation qui en est faite ensuite soit dans 3/4 des cas les réseaux sociaux. Je crois que l'on ne raconte une histoire en photo et en video de la même manière. 

Comment avez-vous vécu le confinement, cette crise sanitaire s'est révélée créative ou l'inverse ?

M.L : Je l'ai vécu comme bcp comme une période difficile et compliquée, mon principal soucis étant de sauver l'entreprise GDP. Avec la crise sanitaire tout s'est arrêté du jour au lendemain.  Ils nous a fallut nous adapter à la situation en proposant notamment des cours en ligne, des lives pour garder le contact avec notre communauté.

Il semblerait que l’industrie des oléagineux et du savon, ça vous passionne, est ce vrai ? Racontez-nous !

M.L : De la récolte du fruit jusqu'à la fabrication, le projet savon dans le monde est un travail personnel, c'est en fait une excuse aux rencontres et aux voyages. C'est tout simplement parti du constat que dans beaucoup d'endroits dans le monde, pour ceux qui ont la chance d'avoir une salle de bain . Il y a toujours un petit morceaux de savon sur un coin d'un lavabo et si l'on gratte derriere ce petit morceau se cache tout un tas d'histoires.

De tout temps les hommes se sont adaptés selon les climats et les cultures pour produire du savon à partir d'un corps gras et d'un corps alcalin c'est ce mélange qui donne la saponification. J'ai pu photographier les savonneries ancestrales d'Alep juste avant le début de la guerre et leur destruction.  Pourquoi Alep en premier ?  Parce que le savon d'Alep est le premier savon solide de l'histoire, c'est grâce à cela que les croisés ont pu le rapporter jusque en occident à Marseille.

Petit vous rêviez déjà de devenir photographe ? Quel a été votre premier appareil photo ?

M.L : 
Je ne rêvais pas encore de devenir photographe, mais j'aimais déjà ça,  j'étais abonné à geo et national géographique. Mon premier appareil a été un Kodak ektra 200 sorti dans les années 80  très étroit quand on l'ouvrait cela faisait une poignée pour le tenir. Ensuite à 15 ans j'ai acheté à l'occasion d'un voyage en asie mon premier reflex argentique un Canon A1.

Pour terminer, il y a quelques années on disait que pour se faire un nom, il fallait faire la couverture d'un célèbre magazine, aujourd'hui quel est le meilleur support pour un photographe en quête de reconnaissance ?

M.L : Je crois que pour ce faire un nom il faut essayer de montrer son travail sur un support qui restera dans le temps comme un livre. Aujourd'hui ce qui est à la mode c'est instagram, tous les photographes ont un compte instagram pour montrer leur travail et essayer de se faire remarquer.

Pour vendre leurs produits, les marques l'ont bien compris, elles font plus souvent appellent à des influenceurs qu'à des photographes, la qualité de l'image est devenue secondaire le premier critère est le nombre de followers.
Pour ma part je ne suis pas super fan, je trouve que cela a un côté pervers et narcissique auquel je n'adhère pas.
Mais c'est comme ça, il faut suivre le courant et s'adapter jusqu'à la prochaine mode.