Écrire des pièces de théâtre sur des sujets polémiques : le défi de Jérémie Trousselier, comédien et auteur de la pièce "Sugar Baby"

Écrire des pièces de théâtre sur des sujets polémiques : le défi de Jérémie Trousselier, comédien et auteur de la pièce "Sugar Baby"

Écrire des pièces de théâtre sur des sujets polémiques : le défi de Jérémie Trousselier, comédien et auteur de la pièce "Sugar Baby"

Connaissez-vous le phénomène des Sugar Babies ? Ce terme tout droit venu des États-Unis désigne les jeunes femmes qui entretiennent des relations avec des hommes âgés, le plus souvent afin de profiter de leur situation. Sujet de débat pour certains, source d'inspiration pour d'autres... Le comédien et dramaturge Jérémie Trousselier traite la question dans "Sugar Baby", une comédie à retrouver à La Folie Théâtre jusqu'au 22 juillet.

Jérémie Trousselier, à quel âge est née cette passion pour le théâtre ?

J.T : Et bien cela est peut-être surprenant mais le théâtre n’est pas une passion, l’écriture en est une. J’ai commencé un peu par hasard, après 5 ans d’étude en cinéma à la fac, j’ai décidé de prendre des cours de théâtre parce que j’avais envie de me mettre à la place des comédiens qui joueraient mes textes. Comment, en tant que comédien, on appréhende un texte ? Comment on le travaille ? Comment on le façonne ? Et du coup, inversement, comment en tant qu’auteur je peux écrire pour que le comédien puisse s’approprier le texte plus facilement ? Je voyais plus dans ces cours une étape de travail qu’une véritable volonté de faire du théâtre. Et puis petit à petit, on se prend au jeu ! Ma professeure de l’époque, Isabelle Gasparini, m’a donné l’occasion d’écrire pour notre troupe, et quand j’ai entendu les premières fois mes textes lus par des comédiens, j’ai su que le théâtre serait pour moi un moyen parfait pour exprimer ce que j’avais en moi.

Avez-vous toujours voulu être comédien ?

J.T : Absolument pas ! Je suis d’un naturel plutôt timide et réservé, je n’aime absolument pas être au centre de l’attention donc être comédien n’était vraiment pas dans mes pistes de réflexion. Je me souviens surtout de la torpeur que j’ai ressentie quand il a fallu aller sur le plateau pour faire mes premières improvisations en atelier de théâtre. J’ai dû passer quelques barrières mentales mais une fois ces étapes passées, le plaisir de monter sur scène devant un public est incommensurable.

Quelle formation avez-vous suivie ?

J.T : J’ai fait 5 années à l’Université de Saint Denis en cinéma, où j’ai pu travailler l’écriture mais également la mise en scène, la production, l’analyse d’une œuvre. Puis j’ai commencé le théâtre en amateur pendant 5 ans où j’ai eu l’opportunité de jouer, d’écrire et de d’apprendre en assistant mise en scène.Et aujourd’hui, je continue d’apprendre avec mes camarades de scènes Anne Fougerat, Ioanna André, Jean-Francois Hoche et Xavier Pilloy qui sont eux, passés par l’atelier Blanche Salant et Paul Weaver. C’est d’ailleurs surement une des choses que j’aime le plus dans ce travail, c’est son aspect organique. On ne cesse jamais d’apprendre et chacun peut t’apporter un regard diffèrent sur ton métier.

De comédien à metteur en scène, il n’y a qu’un pas. Vous avez justement mis en scène et écrit « Sugar Baby », une pièce à retrouver actuellement à La Folie Théâtre. De quoi ça parle ?

J.T : François, un incurable romantique et exigent en amour, présente sa nouvelle petite amie, Marie, lors d’un diner à ses meilleurs amis, Marc et Capucine. Ce qu’il avait omis de leur dire, c’est que Marie est plus jeune que lui de 13 ans. Une différence d’âge qui n’aurait pas dû poser de problème mais c’était sans compter sur la lourdeur de son ami Marc ! Lui soufflant la possibilité que Marie soit une sugar baby, une jeune fille entretenue, François plonge dans la brèche et décide lui faire croire que c’est le cas. S’en suit alors des quiproquos, des sous-entendus et une tension qui monte crescendo jusqu’à exploser à l’arrivée d’un invité mystère, Philippe, qui semble très bien connaitre Marie. Une pièce qui nous permet de revisiter des codes du vaudeville, du boulevard mais aussi de la comédie romantique. Et si la pièce est une comédie, elle ne nous empêche pas de pouvoir brasser des thématiques plus dramatiques comme le phénomène de sugar dating, de la précarité étudiante mais également de la misogynie et des clichés sur les relations femmes-hommes qui ont la vie dure.

On vous retrouve dedans ! Parlez nous de votre personnage de François.

J.T : François, il se pense un peu comme le gendre idéal. Il est courtois, galant, gentil, il a une bonne situation mais comme il pense être quelqu’un d’exceptionnel, il attend d’avoir une partenaire exceptionnelle. Ce qui lui a causé quelques déconvenues avec la gent féminine tant il a des critères qui frôlent l’absurdité. Derrière ses allures d’eau calme se cache une véritable impulsivité qui le dessert lorsqu’il doit gérer des situations de crise. Et autant dire que dans Sugar Baby, il va devoir en gérer et cela se fera souvent à ses dépens.

Qu’est ce qui vous a inspiré dans l’écriture de cette pièce ?

J.T : Tout d’abord, le sujet principal qui donne son nom à la pièce, le phénomène des sugar baby. Un mouvement qui s’est amorcé il y a quelques années, qui tend a profité de la situation précaire des étudiants et plus spécifiquement des étudiantes. Il permet à des hommes plus âgés et aisés de profiter des services d’une jeune femme moyennant des « cadeaux » (loyer, sorties, vêtements…). Une forme de prostitution mais qui n’en porte pas le nom. C’est Xavier Pilloy, mon binôme en mise en scène et qui joue également le personnage de Marc, qui m’a alerté sur le sujet. J’y ai vu une occasion de pouvoir, à mon tour, en parler. Au fil de l’écriture, le sujet s’est étoffé en cherchant à questionner la liberté de disposer de notre corps, le sexisme mais également la lutte des femmes dans leur recherche d’égalité et de reconnaissance qui leur ait dû.

Quel conseil donneriez-vous à tous les comédiens de Casting.fr ?

J.T : À mon petit niveau, je ne peux que leur conseiller de s’accrocher, d’y croire et de travailler assidument. Nous ne cherchons pas la facilité lorsque nous nous lançons dans une voie artistique, loin de là. Autant dire que ça crée de belles insomnies ! Avec la compagnie que nous avons montée avec Xavier Pilloy, nous avons mis 4-5 ans avant de pouvoir être programmé sur la longueur avec une pièce originale et ça a été tout un périple et ça l’ait encore. On est conscient que le monde ne nous attend pas et qu’il faut batailler durement pour se faire une place. Au final ce que je conseille, c’est de s’intéresser à tous les corps de métier de notre domaine, de l’écriture à la production d’un spectacle. Une fois que vous avez identifié les embuches que vous pourriez croiser, il est parfois plus facile de les affronter.

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Informations pratiques

Dates : Du mercredi au samedi à 21h jusqu'au 22 juillet. La troupe sera ensuite au Festival Fourberies en Scènes à Saint-Lunaire (358000) du 12 au 15 août.

Lieu : À La Folie Théâtre (6 Rue de la Folie Méricourt, Paris 11).

Auteur : Jéremie Trousselier.

Mise en scène : Xavier Pilloy et Jéremie Trousselier.

Avec : Jéremie Trousselier, Ioanna André, Anne Fougerat, Jean-François Hoche et Xavier Pilloy.