La comédienne Laura Kpegli à l'affiche, nous dit tout sur ce métier qui fait tant rêver

La comédienne Laura Kpegli à l'affiche, nous dit tout sur ce métier qui fait tant rêver

La comédienne Laura Kpegli à l'affiche, nous dit tout sur ce métier qui fait tant rêver

Bonjour Laura Kpegli, à l'affiche actuellement dans le film Simshar vous incarnez une jeune clandestine nommée Makeda, c'est votre premier "grand" rôle?

L.K Le rôle de Makeda que j’interprète dans le film Simshar n’est pas mon premier “grand rôle” dans la mesure où j’ai déjà participé à plusieurs longs-métrages. Cela dit, c’est le premier rôle pour lequel j’ai dû changer temporairement de lieu de vie pour le tournage, ce qui m’a transformé. C’est aussi un rôle qui m’a demandé beaucoup de sincérité quand à mon histoire personnelle et mes aspirations, dans le but de ne pas trahir celles de mon personnage. Effectivement je suis née à Paris, je n’ai jamais traversé le monde clandestinement et je ne suis pas polyglotte. Mon personnage si, j’ai donc appris à parler quelques mots d’arabe, de tigrigna (la langue de l’Erythrée) et je jouais en anglais. Aussi l’équipe réunissait des professionnels des quatre coins du monde, à Malte, et chaque jour une centaine de personnes s’activaient autour de Rebecca Cremona la réalisatrice. Je n’avais pas connu ce genre de configuration auparavant.

Comment avez-vous décroché ce rôle? Un casting?

L.K J’ai décroché ce rôle grâce à Matthieu Seel, photographe à Paris, et Angélique Muller, productrice et réalisatrice française résidant à Malte. C’est sur leurs conseils que j’ai été recommandée à Edward Said, directeur de casting pour Simshar. Le casting a quant à lui a été dynamique et mobile, à l’image du film, parce que nous avons échangé plusieurs fois sur skype avec la réalisatrice, avant de nous rencontrer physiquement et de travailler ensemble.

Racontez-nous votre parcours,  devenir actrice un rêve d'enfance?

L.K J’ai commencé le théâtre à 11 ans, après que ma mère m’est inscrite dans le cours municipal de ma ville de banlieue. Je crois que c’est le meilleur cadeau qu’elle m’ait fait dans ma vie !  J’ai toujours aimé raconter des histoires, en inventer et en écouter. J’ai toujours été avide de ma propre histoire, née d’un père togolais et d’une mère française. J’ai ressenti très tôt ce besoin d’expression, et l’envie de le sortir de l’ordinaire. Appréhender ce qui semble inaccessible ou éloigné, par le biais du récit, des détails, de l’imaginaire. Dès que j’ai eu 18 ans j’ai créé ma première compagnie de théâtre, Les Contes de Gilbert, et j’ai mis en scène à 19 ans Les Monologues du Vagin, pour la rue en Avignon. Avec mes camarades de l’époque, plutôt que de rêver, nous n’avions peur de rien de notre réalité. L’enjeu était de faire, de dire, d’inventer coûte que coûte.

Avez-vous pris des cours dans de comédie ou suivi une formation dans une école pour devenir actrice?

L.K Dès que j’ai pu travailler à 16 ans, je me suis payée des cours pour enfants/ado au cours Simon à Paris. Chaque mercredi était une aventure à part entière. Plus tard, j’ai suivi une formation au Conservatoire du Val Maubuée. J’y ai appris les classiques du théâtre français, comment jouer juste en alexandrins. Cela m’a aussi permis d’écrire et de monter ma première pièce, Portrait de Quai. Je suis également titulaire d’un master Arts et techniques de la Scène de l’Université Paris 8. Mais, ce qui m’a formé en tant qu’actrice et conteuse, c’est le TITO : Théâtre Itinérant au Togo. Un dispositif de rencontres et de spectacles itinérants que j’ai commencé en 2003, jusqu’à 2011. C’est là que je me suis construite, que j’ai appris mon métier. Se soumettre à son propre travail, voyager, jouer dans des endroits où personne ne nous attend, donc créer son propre public, marier les langues, jouer en silence, pour des enfants de 3 ans comme pour des vieilles de 90 ans. Respecter sa parole, et la faire circuler. Apprendre de nouvelles histoires, de nouveaux canevas d’improvisation et de scénarisation. Le Togo m’a toujours inspiré, j’ai donc plutôt tendance à dire que je me suis formée sur le terrain.

D'après vous on naît comédienne ou on le devient? Quelles sont les qualités indispensables?

L.K Je me suis toujours sentie l’âme d’une conteuse d’histoires avant de me frotter au cinéma. Je pense donc que je suis née, en tout cas, que j’ai grandi avec cet amour pour les paroles et les images. J’aime être surprise, et le conte puis le théâtre ont longtemps comblé ce besoin de surprise. Avec le temps, je reconnais que l’on devient comédienne, artiste. Le plus dur c’est de durer. Les qualités indispensables ne sont pas celles que l’on croit : une interprétation impeccable, une belle gueule, des relations. Ce qui compte c’est la constance. Pouvoir se mettre au service de quelqu’un qui a de l’influence comme de quelqu’un d’inconnu, par respect pour son art. C’est aussi savoir soutenir son partenaire, dans l’interprétation, ne pas jouer seule. Faire vibrer l’action ensemble, ne pas jouer dans son coin. Ce sont aussi les échanges, pouvoir souder une équipe, qu'elle soit artistique ou  technique. Je crois que lorsqu’on respecte sa sensibilité, tout en cherchant à comprendre le travail de l’autre, on devient bon.

Qui vous inspire ou vous influence dans ce métier ?

L.K Les personnes qui m’inspirent ou m'influencent dans ce métier sont toutes celles que je rencontre au quotidien, qui savent ce qu’est travailler et qui le font avec le cœur. Je m’inspire en observant quelqu’un, je me laisse influencer le temps d’une discussion. Ce qui m’inspire au fond, c’est la rencontre des autres et le dépassement de soi.

Des castings vous en passez beaucoup, racontez-nous votre plus beau souvenir.

L.K Je dois reconnaître que je n’ai pas passé beaucoup de castings dans ma vie, parce que j’ai eu la chance de faire des rencontres intéressantes qui ont coïncidé avec les projets sur lesquels je me suis engagée. Mon plus beau souvenir de casting, c’est mon premier. La première fois. J’avais 11 ans justement, ma professeure de théâtre nous a informés d’un casting enfants pour le téléfilm L’instit. L’industrie du film se matérialisait devant moi ! Je me rappelle que dans la salle d’attente, il y avait d’autres enfants qui avaient l’air bien au fait du métier. Et justement l’un d’eux me demande : tu as passé combien de castings dans ta vie ? Je lui réponds : c’est le premier. Lui avait déjà une expérience digne d’un adulte. Quand ça a été mon tour, j’ai été touchée par le professionnalisme des adultes, leur considération. Je n’ai pas été choisie, ni spécialement chouchoutée, mais la télé, le conte, le théâtre, le cinéma, tout ce que j’aimais devenait un métier à part entière ce jour-là.

Le pire souvenir?

L.K Je ne peux pas raconter de pire souvenir de casting, en tout cas rien comparé aux anecdotes que des amies m’ont raconté. Surtout une amie, Amandine Gay, qui en a eu assez des castings pour des rôles de prostituées, de dealeuses, de femmes de ménage, qu’elle passait en France. Je pense que toutes les vies sont bonnes à raconter, tous les métiers, reste à savoir ce qui est dit dans les histoires. Je sais que les choix d’Amandine Gay vont avec les défis qu’elle se lance, et avec son parcours d’artiste engagée et de réalisatrice. Elle vit actuellement à Montréal où elle boucle son premier film. Je n’ai pas de pire souvenir, mais je ne peux pas nier que j’ai eu des mauvaises surprises, moi qui aime les rôles forts, bien écrits, impactants, surprenants. La réalité n’est pas toujours aussi excitante.

Auriez-vous un truc ou une astuce à nous donner pour réussir un casting?

L.K Y a-t-il une astuce pour réussir un casting ? Je pense machinalement à l’appli Jobmaker. Être en position d’offreur, pas de demandeur. Oui, je dirais, de ne jamais se mettre en position de demandeur, toujours offrir le meilleur de soi-même. Par respect pour son métier, et peu importe la médiocrité ou le talent de la personne en face. Se respecter en toute circonstance, ne pas chercher à dominer les autres, mais chercher à être juste pour dominer par le talent.

Racontez-nous le moment qui vous a le plus marqué sur le tournage du film Simshar? 

L.K Le moment qui m’a le plus marqué sur le tournage du film Simshar est ce moment d’attente entre deux prises, sur le paquebot où se passe la moitié de l’action. Je réalise que les figurants qui jouent les rôles d’autres migrants, sont de véritables migrants arrivés à Malte. Ils me content leur histoire en anglais autour d’un thé, leur choix, une partie de leur destin. C’est là que j’ai réalisé mon rôle. Je sortais du drame de l’immigration, et du conte de fée de la jolie-petite-actrice-française-métisse, en route pour un gros tournage. Je réalise que j’aurais pu faire exactement les mêmes choix. Partir, pour vivre librement, pour exercer le métier que je veux faire, pour offrir un avenir à mon enfant. C’est d’ailleurs ce que j’ai fait plusieurs fois dans ma vie. Je réalise que la deuxième histoire du film est aussi issue de faits réels, c’est l’histoire d’une famille maltaise. Soudain en prise avec la fiction, toutes ces réalités me parviennent. J’ai fait tomber les masques au milieu de la méditerranée, avec les figurants et les professionnels européens, africains, américains, et a fait grandir mon rôle. Je savais que le soir mon appartement cosy m’attendait, de même que les rues hospitalières de la ville. Je n’ai pas eu honte, je me suis sentie à ma place, heureuse d’investir ce rôle, reconnaissante d’avoir été choisie, touchée par la confiance humaine et artistique de toute l’équipe de Simshar. J’ai pressenti à ce moment-là, la puissance du film. Je me suis donnée à fond.

Où trouvez-vous des annonces de castings, vous surfez sur le net et plus précisément casting.fr?

L.K Je suis très curieuse de voir la façon dont casting.fr peut influencer mon mode de communication et d’implication sur de nouveaux projets. Après une première amorce en 2011, je suis ravie de renforcer ce lien à l’occasion de la sortie de Simshar. Je vous remercie pour cette interview, j’ai été surprise par la réactivité et la spontanéité de vos équipes, ce qui me laisse envisager une belle poursuite de nos échanges.

Merci à vous Laura Kpegli et à tres bientôt pour de futures collaborations. Nous vous souhaitons le meilleur pour votre carrière artistique.