Mannequinat senior : Sylvie Fabregon, la fondatrice de l’Agence Silver, casse les idées reçues
Mannequinat senior : Sylvie Fabregon, la fondatrice de l’Agence Silver, casse les idées reçues
Le mannequinat est-il réservé aux jeunes ? À 60 ans, peut-on encore espérer intégrer une agence ? Sur Casting.fr, nombreux sont les membres à s’interroger sur leur légitimité dans ce milieu. Pourtant, les mentalités évoluent. Grâce à des figures comme Sylvie Fabregon, fondatrice de l’Agence Silver, le secteur s’ouvre de plus en plus aux profils seniors. Dans cet entretien, elle partage son parcours et livre ses conseils pour candidater efficacement.
Bonjour Sylvie Fabregon. Vous avez fondé l’Agence Silver. Quel est votre parcours ?
S.F : J’ai commencé chez Paris Planning dans les années 80. Je n’étais pas bookeuse. J’étais l’assistante de Servane Cherouat, qui s’occupait des droits de reproduction et du syndicat des agences de mannequins. Ensuite, je m’occupais d’enregistrer les mannequins. C’est à ce moment-là que je suis devenue bookeuse. Chez Paris Planning, je travaillais avec Gérald Marie. Par la suite, il a créé Elite avec John Casablancas. Je suis donc partie travailler avec eux pendant assez longtemps. Après Elite, j’ai fait d’autres petites agences. Quand les filles de l’Est sont arrivées sur le marché, je n’ai plus trop aimé le métier. Ce n’était plus le même genre de femmes, plus maigres, plus stéréotypées, toutes une peu les mêmes, moins de forme, moins de caractère… Elles n’étaient plus des stars mais juste des mannequins. J’ai donc décidé de changer de voie, et je suis partie 3 ans avec Vanessa Paradis. J’étais l’assistante de son oncle. Ensuite, j’ai fait un bébé, et après ça, je n’avais plus envie de retourner chez les mannequins, donc j’ai fait des petits métiers et même une émission sur France 5.
Quel parcours ! C’est donc là qu’est née l’Agence Silver ?
S.F : Après avoir travaillé avec des filles comme Linda Evangelista ou Naomi Campbell, qui sont toujours belles et qui vieillissent bien, et en ayant vu également mes parents vieillir tout en continuant à mettre des jeans, je me me suis dit qu’il y avait un manque pour les seniors, les gens plus âgés qui ont été jeunes, qui ne sont pas les anciens vieux comme ma grand-mère et mon arrière grand-mère, qui font encore partie de la société de consommation, mais qui, pour autant, n’ont plus rien qui les fait consommer. C’est comme si à partir de 50 ans, on devenait vieux, alors qu’on ne l’est pas. Donc il y a 20 ans, je suis allée proposer mon idée à Eric Perceval et Fabrice Dendraën, qui étaient les directeurs du groupe Models. Ils m’ont dit ok, on ouvre un département qui va s’appeler “Masters” au départ. C’était juste pour les gens de plus de 50 ans qui étaient comédiens ou mannequins. En ayant créé Masters, je voyais petit à petit qu’il y avait une vraie différence entre les anciens mannequins qui commençaient à venir chez Masters et les comédiens, les petites mamies. Donc on a ouvert Silver il y a 10 ans, et qui était pour les anciens mannequins qui avaient bien vieilli.
Cette agence est donc le résultat d’un constat de manque de mannequins séniors ?
S.F : Ce n’est pas un constat, c’est que moi aussi je vieillissais. Quand je les ai appelé, j’avais 40-45 ans, et je me disais qu’il y avait de la mode que pour les jeunes, alors que nous aussi à 40 ou 50 ans on pouvait aller s'habiller chez H&M ou Zara et trouver des trucs qui ne soient pas des crop tops. On nous montre que des filles de 20 ans qui disent ‘il ne faut pas de rides”, alors qu’à 20 ans, on sait qu’on a pas de rides. Je trouvais que c’était un petit peu bizarre pour ma génération et celle de mes parents de ne pas être là. J’ai donc proposé mon idée pour les plus âgés, afin de montrer qu'à 40- 50 ans, la vie n’est pas finie et qu’on a encore du temps devant soi. Le temps d’aimer, de devenir amoureux…
Constatez-vous que le secteur est de plus en plus ouvert aux personnes de plus de 40 ans aujourd’hui ?
S.F : Oui ! Maintenant, c’est complètement ouvert. Au départ, c’était plus de la publicité. Aujourd’hui, c’est aussi de l’édito, des magazines, de la beauté, des défilés et des parfums.
Donc les marques et les agences de publicité sont en demande de profils sénior ?
S.F : Oui. Il y a beaucoup de demandes pour des profils de plus de 40 ans. C’est drôle parce que de temps en temps, ils nous demandent des femmes de 60 ans. Quand on leur envoie des femmes de 60 ans, ils disent “non non, plus vieille”. On a encore dans la tête la femme de 60 ans comme on la voyait avant et pas comme elle est aujourd’hui.
Beaucoup de membres de Casting.fr âgés de 40 ans et plus se demandent comment signer en agence ? Comment intégrer l’Agence Silver ?
S.F : Il faut aller sur le site, envoyer des photos et un CV. Il faut plutôt être un ancien mannequin avec de l’expérience dans le milieu et savoir poser. Il y a des critères physiques. Il faut plutôt être grande, fine, avec un joli sourire, les critères mannequin de base. Silver, c’est des professionnels, des anciens mannequins qui ont repris leur carrière par la suite après avoir vécu autre chose et qui se disent “je peux toujours être mannequin”. Pour Masters, c’est différent. C’est plus pour des comédiens et comédiennes. Il n’y a pas besoin d’être super beau. En même temps, être beau, ce n’est même pas ce qu’on demande aux mannequins chez Silver. On leur demande d’avoir un charisme, une prestance et des belles rides.
Quelles photos conseilleriez-vous de mettre dans une candidature ?
S.F : Des photos toutes simples. Pas de photos de famille avec le visage de l’autre effacé. Des photos sur un mur blanc, de face, de profil et des photos de votre silhouette.
Quels sont les éléments les plus importants à mettre en avant lorsqu’on postule à un casting ou qu’on souhaite démarcher une agence comme l’Agence Silver ?
S.F : Les photos pour voir la photogénie, le sourire et le sérieux. Des photos simples où vous n’êtes pas apprêté, pas de lunettes, et pas prises par un photographe professionnel. Des photos faites par quelqu’un qui vous prend devant un mur blanc. Et donner les tailles, la hauteur, le tour de poitrine, le tour de taille et de hanche.
Faut-il forcément avoir un agent ou être représenté par une agence pour accéder aux castings ?
S.F : C’est mieux parce qu’il faut une licence. Les mannequins sont salariés, donc il faut quelqu’un qui les salarie. Ce sont les agences qui donnent le droit de salarier les mannequins. Donc oui, il faut avoir une agence.
Quelles sont les erreurs fréquentes à éviter lorsque l’on passe un casting ?
S.F : Quand on passe un casting, il ne faut pas trop en faire et bien lire l’annonce.Il y a de plus en plus de casting par selftape, donc il faut peut-être avoir du matériel chez soi pour pouvoir se filmer. Ils demanderont en général une vidéo de présentation et des polaroïds, c’est-à-dire des photos non retouchées. Je dirais aussi qu’il faut se présenter selon ce que l’agence propose. Des présélections sont faites par les agences. On nous donne un casting, et on envoie des sélections de profils. Ensuite, le client ou le directeur de casting dit “je suis intéressé par…”. On envoie la demande à ces mannequins et comédiens. Tout est bien expliqué dans les demandes qu’on envoie.
Un conseil pour les membres de Casting.fr qui souhaitent se lancer dans les castings ?
S.F : Ne pas tricher sur son âge, être bien dans sa peau, ne pas avoir envie de faire plus jeune que son âge, ne pas en faire trop, rester naturel et faire marcher son charisme. Il y a de plus en plus de demandes de naturel, donc pas de photos retouchées, pas de photos avec la main sous le menton, les lunettes sur le côté….
Un grand merci à Sylvie Fabregon pour cet échange éclairant. À bon entendeur ! Des conseils précieux pour celles et ceux qui souhaitent se lancer dans le milieu du mannequinat senior.