Jonathan Chaboissier, comédien et professionnel de l’improvisation, a accepté de répondre à notre interview en toute sincérité!

Bonjour Jonathan Chaboissier, vous êtes comédien, passionné d’improvisation, racontez nous.  

JC : J'ai démarré le théâtre écrit et l'improvisation théâtrale en même temps quand j'étais étudiant. On faisait des matchs d'impro entre grandes écoles. Le virus m'a pris et je n'ai jamais arrêté depuis.
Au bout de quelques années de pratique, j'ai découvert les long formats improvisés qui consistent à improviser une pièce de théâtre, au lieu d'une suite de sketchs. C'était pour moi le meilleur des deux mondes !

Avez-vous suivi une formation pour devenir comédien ?

JC : j'ai pris des cours en école de théâtre jusqu'au 2eme cycle du conservatoire, mais j'ai surtout appris en participant à une multitude de pièces de théâtre classiques en amateur au sein de groupes passionnés et exigeants. Les projets de théâtre, des répétitions aux spectacles en passant par les temps de création des décors et des accessoires, c'est super formateur.
Côté impro, c'est en devenant moi-même enseignant que j'ai le plus progressé, en parallèle de stages avec des références internationales de l'improvisation.
Mon activité de comédien improvisateur est composée des spectacles de ma troupe Smoking Sofa et des cours d'impro pour débutants et confirmés.

Dans le mot Impro, ben il y a improvisation! Alors ça se prépare ou pas?

JC : Excellent question ! Oui, il y a énormément de préparation... mais on ne sait pas au final ce qu'on va raconter le jour J. En impro, comme dans un sport collectif, on travaille nos réflexes de co-construction, de mise en scène en temps réel et nos talents de storytellers. On apprend les structures narratives des histoires. On travaille des personnages et on développe le jeu d'acteur pour être capable de jouer toute une palette d'émotions et d'intentions.
Une fois sur scène, on oublie tout et on se concentre dans le moment présent sur ses partenaires de jeu. 

En ce moment, vous présentez la pièce d’improvisation “Hommes·Femmes de ma vie” accompagnée de l’actrice Muriel Ekovich, parlez-nous du concept.

JC : c'est un duo d'impro qui réunit une femme et un homme. Le public choisit l'un d'entre nous pour incarner le personnage principal, et l'autre joue alors tous les personnages secondaires.
Si je suis choisi, Muriel jouera "toutes les femmes de ma vie", et à l'inverse je ferai "les hommes de sa vie" si c'est Muriel l'héroïne du soir.
Ce concept nous permet d'explorer les relations hommes-femmes au niveau familial, amoureux, professionnel...

Comment est né le sujet de la pièce?  

JC : Un jour, lors d'une implantation technique pour un autre spectacle d'impro qui se jouait à 6, seuls Muriel et moi étions disponibles pour briefer le régisseur. On a dû jouer un exemple de spectacle... alors qu'on n'était que 2 présents ! Muriel a joué l'héroïne de l'histoire et moi je faisais tout le reste : narrateur, personnages, etc. Le régisseur a été bluffé et nous nous sommes bien amusés. C'est là qu'est née l'idée du format.

Comment vous êtes vous rencontrés avec Muriel, et qui est Muriel?

JC : Muriel et moi pratiquons l'impro depuis plus de 15 ans, et nous avons fini par nous rencontrer à force de fréquenter les mêmes communautés d'impro. Lorsque nous avons découvert que nous étions tous deux passionnés par les formats longs, je me suis rapproché de la troupe Smoking Sofa que j'ai fini par rejoindre.
Nous sommes tous les deux ingénieurs et docteurs, ce qui est assez rare pour des comédiens d'impro. A la fois très proches dans notre manière de nous organiser, et complémentaires dans nos approches artistiques, nous sommes devenus un binôme habitué à jouer ensemble. Nous avons une complicité de jeu tellement développée que l'on sait d'un simple regard ce que l'autre va proposer. Plutôt utile pour improviser ! 

Selon vous, quelle est la différence fondamentale entre le jeu et l’improvisation ?

JC : Si vous parlez du jeu d'acteur sur un spectacle écrit, la différence est que l'acteur sait où il va et doit reproduire les répliques et émotions qui ont été travaillés en répétition ; alors que l'improvisateur sait seulement d'où il vient, et découvre au fur et à mesure le voyage de ses personnages. Les improvisateurs sont à la fois acteurs, auteurs et metteurs en scène.
L'autre différence est que le public vient voir de l'impro pour voir de l'impro : il est bon de montrer les ficelles, d'assumer de se planter et de parfois décrocher. Alors qu'au théâtre écrit, le public veut voir des personnages et croire à l'histoire qu'on lui raconte.

Quels avantages peuvent apporter l’improvisation dans la vie quotidienne ?

JC : les techniques de l'improvisation sont de formidables clés comportementales pour mieux communiquer et développer son lâcher prise. "Pas de stress", "on verra bien", "on s'en sortira" ! Plus on improvise, plus on travaille son rapport à l'erreur, son écoute et son adaptation aux imprévus. D'ailleurs, c'est tellement efficace qu'on utilise les outils de l'impro pour animer des formations en entreprise sur ces thématiques là.

Vous est-il déjà arrivé de complètement louper une improvisation sur scène, racontez-nous, comment avez-vous rebondi ?

JC : Oui c'est arrivé plein de fois, et c'est aussi ce que vient voir le public ! L'astuce c'est de toujours avoir de l'autodérision, de garder une attitude positive et de savoir se remobiliser dans le récit pour repartir.
Depuis qu'on est improvisateurs professionnels dans ma troupe, cette attitude est tellement intégrée que cela ne nous arrive plus de "louper" une impro. Il peut arriver qu'on se sente un peu moins inspirés, ou alors moins portés les soirs où il y a peu de public, mais comme des musiciens de jazz qui maîtrisent leurs instruments et les gammes, notre bagage technique garantit une soirée réussie pour le public.

Quels conseils donneriez-vous aux membres de Casting.fr, qui comme vous, souhaitent devenir un pro du théâtre et de l’improvisation ? 

JC : Pour moi, la clé est d'être proactif et de monter ses propres projets. C'est en travaillant qu'on apprend. Inutile de trop se mettre la pression au début, les premiers spectacles auront plein de défauts mais cela fait partie de l'apprentissage.
C'est aussi essentiel à mes yeux de savoir s'entourer de personnes sur la même longueur d'onde que nous, tant au niveau de l'investissement attendu que du sérieux de l'organisation : arriver à l'heure, préparer les répétitions/entraînements, connaître son texte. 
Enfin, aller voir plein de spectacles et participer à des stages sert aussi à développer son réseau et saisir les opportunités.

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