"Je fais ce que je veux quand je veux", voici la vision libre qu'a Alexandre Delimoges, du métier de metteur en scène et de producteur.

"Je fais ce que je veux quand je veux", voici la vision libre qu'a Alexandre Delimoges, du métier de metteur en scène et de producteur.

"Je fais ce que je veux quand je veux", voici la vision libre qu'a Alexandre Delimoges, du métier de metteur en scène et de producteur.


"Bonjour Alexandre Delimoges, vous êtes à la fois metteur en scène, acteur, auteur et producteur. D'où vient cette énergie pour arriver à tout concilier ?

Pour l’énergie ? Je suis végétarien et je fais attention à ce que je mange. Il fallait que je le dise, c’est mon côté activiste ;) Non sans rire, je n’arrive pas à m’arrêter, ça va à mille à l’heure dans ma tête, jour et nuit. Je n’arrive pas à imaginer un projet dans lequel je ne sois qu’un maillon, sur lequel je n’aurais qu’une faible action. J’ai besoin de faire partie du projet de A à Z. Je ne veux pas dire que je n’ai pas besoin d’autres professionnels pour travailler avec moi, non, au contraire. Mais j’ai difficilement confiance et je n’aime pas l’inconnu. Il faut que je sois au courant (et d’accord) sur tout.
Et puis, il faut dire que tout m’intéresse. Tous les aspects du métier m’intéressent, donc.
Après, ce n’est qu’une question de temps, de priorités. Il faut savoir mettre sa vie sociale de côté, souvent. Pour moi, ce n’est pas difficile.

Vous avez commencé votre carrière sur les planches en tant que comédien. Qu’est-ce qui vous a motivé à devenir metteur en scène et à être directeur depuis 1994 de l'école du One Man Show ?

J’aime fantasmer sur les autres. Sur une comédienne, par exemple Frédérique Lelaure, Laurence Arné ou Anne Cangelosi, ce qu’elles étaient capables de transcender presque malgré elles… c’est ce qui m’est arrivé la première fois que j’ai mis en scène quelqu’un. Et je pense qu’on a fait ensemble l’un de leurs spectacles les plus forts. Le fantasme est la plus importante des choses pour un metteur en scène de One Man Show (où, contrairement au théâtre traditionnel, tout est basé sur la personne), le voyage de l’imagination, voir ce qu’une personne provoque malgré elle sur un plateau. Le décor, la lumière, suivent naturellement ensuite. Ensuite, c’est du détail.
Pour le théâtre traditionnel, c’est différent, c’est plus simple. L’histoire et le propos, l’intention du personnage, indiquent déjà tout. Mais je n’aime pas les choses linéaires, alors je pousse l’acteur à jouer en décalé, à vivre comme dans la vraie vie, à faire des choses dont il ne parle même pas, que l’auteur n’a pas écrites.
Pour l’Ecole du One Man Show, c’est autre chose. Elle a été créée en 1994 et dirigée par William Pasquiet, un grand comédien, un ami. Je l’ai accompagné depuis le début, mais je n’ai repris la direction qu’en 2002. C’était un beau projet, qu’il fallait aider à grandir. Cette école m’oblige chaque année à me remettre en question, accompagné d’une quinzaine de professeurs aussi fougueux que moi, j’adore. Nous avons de la chance de vivre cette sacrée aventure. Une première française, tout reste à inventer, c’est vraiment passionnant !

Vous avez produit de nombreuses pièces de théâtre, dont trois récemment. Elles sont principalement dédiées pour les enfants sauf la dernière qui parle de l'histoire de Gustave Eiffel. Quelle est donc la finalité de cette pièce ?

Je fais ce que je veux et quand je veux, alors il n’y a pas forcément de logique dans tout cela. Les spectacles jeune public arrivent régulièrement dans ma tête parce que chacun est la suite du précédent. C’est une grande saga, que j’ai écrite ou qui est en cours dans ma tête. Donc quand c’est « prêt » dans ma tête, je le monte. Je vais mettre cela de côté pour un an ou deux, mais ça va revenir.
Gustave Eiffel, c’est autre chose. J’adore l’Histoire, et surtout la nature humaine. Approfondir une personnalité comme Gustave Eiffel m’a poussé à me plonger dans le XIXème siècle à fond. J’ai étudié deux ans sur la période, le contexte politique et social, la technique de construction de la Tour Eiffel bien sûr aussi. Le but de ce spectacle est donc de partager avec le public, et pourquoi pas les collégiens aussi, une grande aventure humaine, la Révolution industrielle.
Mon objectif, dans tout ce que je fais, est le divertissement intelligent. Je veux que ce soit intelligent, autant qu’il m’est permis de l’être, mais qu’on s’amuse, qu’on passe un bon (ou un grand) moment. Ni ras les pâquerettes, ni intello. Cette satanée habitude qu’ont certains « théâtreux » de se croire plus intelligents que tout le monde ! Se faire passer pour intelligents au détriment du public, qui s’ennuie la plupart du temps, cela m’horripile… Le théâtre peut nous émerveiller, nous faire voyager.

Pouvez vous nous dire quelles formations vous avez suivies pour arriver à ce que vous faites aujourd'hui ?

J’ai suivi des cours de théâtre en Province puis à Paris, mais rien qui puisse être remarquable, malheureusement. C’est Sylvie Joly, qui m’a mis en scène, qui m’a fait comprendre ce que j’aurais dû comprendre en cours. Peut-être un manque de maturité de ma part. Il s’agit du parler vrai, de la sincérité, de la crédibilité, de la complexité de nos paroles et de nos actions. Sylvie Joly, merci mille fois.
Ensuite j’ai beaucoup appris de mes élèves, en les analysant, en leur montrant parfois ce qu’il fallait faire.
Enfin j’ai suivi des cours de chant, de comédie musicale, à Paris et à Broadway, qui m’ont montré que… « ça rigolait pas ! » Que parler ne servait à rien, douter non plus, et qu’il fallait être fort. Qu’il fallait y aller, et sans relâche !

Vous avez sûrement des idées de créations plein la tête. Quels projets nourrissez-vous pour l’avenir ?

Plein ! Actuellement, j’ai des idées de construire une maison style Hundertwasser, avec un sol « mouvant ». Un projet de parc d’attraction sous terre et dans les airs ne me quitte jamais non plus.
Mais bon, plus concrètement, j’ai quelques seuls en scène historiques en préparation. Je n’en dirai pas beaucoup plus sur la tournure qu’ils vont prendre, mais ce seront de jolies surprises. Des personnages révolutionnaires comme Charlotte Corday, Jean Jaurès, Joséphine Baker, Marcel Bascoulard, François Mitterrand, Jean-Michel Basquiat, Amenophis IV, Walt Disney… vous voyez, il y a du travail. Et puis, faire grandir Gustave Eiffel, mon cheval de bataille actuellement !
Je suis aussi en train d’ouvrir une antenne de l’Ecole du One Man Show à Avignon, et dans un an à Nice, avec Yoann Chabaud.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaiterait se lancer dans le métier de metteur en scène et monter des pièces de théâtre ?"

Je lui dirais d’apprendre à regarder, se laisser aller, laisser vagabonder son esprit pour laisser arriver les impressions, qui se transformeront en certitudes. Ensuite je l’écouterais parler. Si je vois qu’il ne « sait pas s’écouter à l’intérieur », alors je lui dirais « Fais autre chose ». Avoir la vision, c’est capital. Une vision globale, et tout un tas de détails pour la servir. C’est le manque de vision qui fait un mauvais spectacle.
Ceci allié bien entendu à un sens de l’organisation, de la communication, du management. Avec patience, ténacité, talent et courage à foison.
Mais à la base, l’amour du public et l’envie de le voir conquis, évidemment !